Le mois dernier je devais avoir une tenue avec un haut blanc et c'est donc avec une anticipation toute professionnelle que je m'y suis pris la veille. Reprise d'un Pam, col en V et manches courtes. Faisait trèèèès chaud. Viscose de Bennytex et coton à trous de MT.
Le V n'est pas parfait mais comme la viscose et moi, on bouge beaucoup, ça fait l'affaire. Coudre à partir de 22h entraîne aussi des finitions à l'arrache. Dernier détail technique: comme l'embus est très con à résorber sur ce modèle, je coupe sans marge la tête de manche et ça tombe quand même bien.
C'est l'été, on est pas mal, et si tout va bien, à l'heure où vous lisez, je suis presque en l'air.
Il y a 10, 15 ans, quand le monde entier s'est remis à coudre (?!), les livres japonais se multipliaient telle la boulangerie divine et poussaient à une consommation déraisonnable. Faut dire que les modèles étaient fastoches, on regardait les images et hophophop; parce que je suis prête à parier que la quasi totalité des couseuses entravaient que dalle à l'idiome nippon. L'engouement était total et inconditionnel, alors qu'il fallait systématiquement reprendre la largeur parachute et les emmanchures rikiki. Jusqu'au jour où les patrons indé ont fait leur apparition aussi rapide et prolifique que les mauvaises herbes de mon jardin après l'orage. On assiste depuis peu à une déferlante qui donne presque la nausée, surtout si tu viens de boire l'apéro. Rien que pour des modèles femme en français, comme ça, à vue de nez, je compte une bonne trentaine de marques. Alors comment s'y retrouver? Mmmm? Les avantages du patron indé c'est que bien souvent tu es guidé dans ta couture, des pas à pas, beaucoup d'images et d'explications, pour débuter, c'est pas mal. Vu le prix, j'aime autant te dire que c'est le minimum syndical. On va quand même pas s'extasier devant cette aide payée au prix fort. Le pdf est une bonne solution s'il ne dépasse pas 8 euros à mon avis. Parce que oui, certains pdf ont le culot d'être deux fois plus cher qu'un magazine à 15 patrons. Je vais te dire un grand secret, quand on ne sait pas coudre, le mieux c'est de prendre un cours ou d'implorer que quelqu'un te montre. Acheter un magazine ou un patron mal ficelés, c'est le meilleur moyen d'abandonner et de reprendre le pilate. Alors on me glisse dans l'oreillette que c'est bien pour la démocratisation de la couture...
Merde, je suis encore tombée de ma chaise. Me semble quand même que traditionnellement ceux qui font leurs vêtements sont rarement issus de la grande aristocratie et que démocratiser c'est donner au plus grand nombre. Je te parle même pas de l'investissement dans une bonne machine. On propose soit des basiques, soit des modèles plus originaux, l'offre est laaaaarge. Un basique déclinable, ça semble bien, mais t'as une tripoté de gratuits sur le net (que je fasse pas les dredi pour rien quand même). Et pour l'originalité de certains, qui a envie de coudre la même chose trèèèès particulière 75 fois? Surtout que l'orignalité se résume parfois à te coller des découpes improbables un peu partout ou des froufrous à des endroits que n'importe quelle morphologie renierait. Et puis ils se ressemblent souvent parce qu'il faut "être dans l'air du temps". Mais alors, originalité et à la mode, est-ce compatible? Nouveau sujet de philo 2018.
On parle un peu des testeuses aussi? Oh si, je me sens bien lancée là. On est clairement dans un monde de bisounours. Tout va toujours bien, le patron est super, la créatrice est trop gentille et à l'écoute, et il doit bien y avoir des cas où c'est vrai. Mais quand on lit un peu partout, ce qui me prend un temps non négligeable mais je voulais pas écrire n'importe quoi, on se rend compte des problèmes de certains modèles jamais soulevés avant la vente. Et ce sont celles qui essuient vraiment les plâtres qui ont le courage de dire ce qu'il en est réellement. Ça fait beaucoup de tort aux créateurs réglos et testeuses sincères. C'est décevant, comme quand je lis (véridique): "ce patron est parfait, j'ai juste rallongé le buste, réduit l'ampleur, raccourci le bas, descendu le col, échancré les emmanchures, modifié la fourche, tout ça de xxx centimètres, ce modèle tombe vraiment bien"..........................
t'es couturière amateur toi ou ingénieur option maçon?
Entendons nous bien, j'ai 5 ou 6 patrons indé moi aussi, une partie en version papier que je ferai un jour où je serai moins énervée, achetés il y a des lustres car étant d'intelligence très moyenne, j'ai pas vu venir le piège. D'autres en pdf à un prix très raisonnable. Parce qu'il est bien là le problème, quand un vêtement va te coûter un trentième du smic sans que tu sois sûr du résultat. Parce qu'il faut aussi prendre un tissu à la mode et bio. Entre nous, les quantités de tissu préconisées sont toujours au dessus de ce dont on a besoin. Quant à la protection de la planète, qu'est-ce que je peux dire? A part le président orange qui s'en bat les roustons, normalement, la plupart de l'humanité se sent concernée. Et oui c'est mieux de prendre un tissu qui respecte l'environnement et les êtres humains qui le fabriquent. Mais j'arrêterai d'être agacée quand celles qui font des lingettes, des couches, de l'essui-tout et que-sais-je de lavables le feront avec autre chose que des tissus achetés à 2 euros le mètre, cesseront de culpabiliser les lecteurs dans leurs articles et comprendront que laver tout ça à 90° avec de l'eau potable a aussi une empreinte carbone. De toute façon, si tu veux être totalement bio, éco, équito... tu vis nu dans un terrier au fond des bois et pas longtemps car dévoré par des microbes ou une tribu de grizzli.
Bref, j'ai repris une D, modifiée depuis l'origine de l'humanité, de là:
Dans un tissu "tendance", double gaze d'une nuance de rose à se taper le cul par terre. Du basique, parce qu'alambiqué, tout le monde a compris qu'en ce moment c'est pas vraiment ce dont j'ai envie.
J'aime la mode, j'aime coudre, c'est un loisir, qui a un coût comme n'importe quoi d'autre. J'aime que l'offre soit large, je préfère coudre à partir d'un magazine ou du net, je scrute les soldes, chacun fait bien entendu ce qu'il veut sauf essayer de culpabiliser autrui, ça c'est trop gonflant et qu'on se rassure, j'ai bien intégré qu'il faut pisser sous sa douche pour protéger la planète.
Chaque décennie de mode a ses codes. Les années 60, 70 et 80 sont à mon avis les plus rigolotes parce qu'elles explosent tout. Elles réinventent le passé, transforment, et surtout exagèrent. Dans les siècles passés, la mode était plus liée à la situation historique, aux conventions sociales. On connaissait la position de quelqu'un selon son habit qui faisait donc le moine. J'ai perdu personne en route? Même si c'est toujours un peu le cas aujourd'hui (je n'ai pas vu de banquier en chemise hawaïenne), on s'autorise un peu de décalage mais en réinventant moins (ou alors on est plus subtil, question de point de vue et de recul) que dans les 30 années dont on va parler dans ces fashion weeks.
Avant d'avoir des problèmes avec les magazines de modes, les créateurs de patrons, le csa, le fbi, les puristes, Karl Lagerfeld ou mon chien, je précise que les images viennent toutes de Pinterest et que dans la mesure du possible j'ai vérifié les dates.
Donc aujourd'hui, on est dans les années 80. SI! Les détails vestimentaires évoqués sont dans tous les patrons de couture ou le prêt à porter. Tout le monde a remarqué les froufrous et les volants, les épaules dénudées? Et ben voilà, on y est en plein. Jusqu'aux accessoires ceinture, pochettes et chaussures...
Bon, les froufrous viennent des années 40, déjà. Tout comme les hauts ceinturés par un noeud sur le nombril...
Moi je trouve qu'en prenant ces patrons de 1980, on est pile dans ce qui ce fait en ce moment.
On continue. Les empiècements de dentelle, les manches bouffantes, le col victorien...
Le bomber...
Et même les socquettes dans les godasses...
La combi....
La jupe culotte (pfff, ça pique de plus en plus) et la midi plissée... non mais on était vraiment obligé?
Le body (alors lui, un intemporel, depuis les années 70)...
On ne se moque pas, y'a pire: pour hommes...
On n'a pas fait le tour de la décennie mais je ne voudrais pas perdre tous mes lecteurs d'un coup. Je suis sûre qu'on pourrait remettre certaines pièces telles quelles. non? Finalement, ce qui a le plus changé, c'est la coiffure, et j'ai envie de dire ouf.
J'en ai acheté plein de çuilà... C'était bien avant les polémiques sur des dealers de tissus et créateurs de patrons. J'ai repris mon patron de là, réduction des marges et manches, et voila un top un peu boite, encore vert.
Va falloir que je liquide toutes ces étoiles... Pas aussi fluide qu'on pourrait le croire avec autant de polyester.
Je voulais un débardeur qui tombe bien. Ben c'est pas gagné. J'ai trouvé là, c'était joli et puis... j'ai flingué mon plumetis vert parce que tout est trop grand. A moins que tu aies des bras larges comme des cochons de lait, les emmanchures descendent jusqu'aux côtes flottantes.
J'abandonne pas l'idée du péplum et du V dans le dos parce que c'est tout de même sympa. Par contre le suspens est total pour savoir si je vais réussir à récupérer mes chutes de tissu.
Me suis rabattue sur le sorbetto, ancien modèle, maintenant faut être inscrit et il y a des variantes. J'avais vraiment envie de vert: commande de double gaze à Perles and co et... en fait c'est du lange, donc avec des carreaux qui me plaisent moyen, et plutôt turquoise que mint. Mais qu'est-ce qui s'est passé? C'est pas donné alors ça fait un peu chier
Pas assez de tissu pour faire le pli central du sorbetto et la mollesse de la matière te fait découper comme si tu étais en Petite Section de maternelle... donc ça ressemble plus à rien et c'est encore un peu large.
J'ai même pas tenté de mettre du biais sur ce lange, trop risqué. Et dire que j'ai d'autres double-gazes qui m'attendent (de la vraie, avec plus de tenue).
Pi ce genre de tissu, ça se repasse pas. Un vrai chiffon je te dis. Bref, je continue ma quête du débardeur parfait et je te tiens au jus.